Agentic Workflow
Limites de l’agent unique
Un Agent AI est un système informatique qui combine LLM/LRM, outils, mémoire, contexte et règles pour observer, raisonner et agir. Cette figure de l’« agent soliste » a démontré des capacités remarquables, mais également des limites structurelles. Même les modèles les plus avancés restent sujets aux biais, aux hallucinations, aux oublis contextuels et aux dérives de consignes. Ces phénomènes ne sont pas des anomalies isolées, mais des effets prévisibles de l’architecture statistique des modèles.
Dès lors, l’usage de l’agent unique se heurte à une contrainte forte : il ne garantit pas une fiabilité suffisante pour des environnements où exactitude, conformité ou traçabilité sont essentielles.
Principes du workflow agentique
Le workflow agentique répond à ces limites en substituant au soliste une organisation distribuée d’agents spécialisés. Chaque agent se voit assigner une fonction précise dans un flux déterminé : analyse, récupération d’information, vérification, rédaction, contrôle qualité, etc.
L’objectif n’est pas de multiplier les modèles mais de structurer le travail en étapes distinctes. Chaque étape a un rôle clairement délimité, avec des entrées et sorties définies, et des règles de qualité non négociables. Surtout, chaque sortie peut être vérifiée et le flux peut être relancé en cas d’erreur, de biais ou d’hallucination.
Cette architecture introduit trois avantages majeurs :
- Lisibilité – chaque étape est compréhensible et auditable.
- Fiabilité – tout résultat peut être vérifié, corrigé ou rejeté avant de passer à l’étape suivante.
- Gouvernance – le processus devient explicable, traçable et ajustable.
Anatomie d’un agent spécialisé
Un agent dans un workflow ne fonctionne pas de manière autonome, mais dans un cadre contrôlé :
- Il est exécuté par un orchestrateur qui déclenche sa mission au bon moment et avec le bon contexte.
- Son output est contrôlé automatiquement ou par un autre agent, avec possibilité de correction ou de relance.
- Il respecte un contrat clair d’entrée/sortie : format attendu, champs obligatoires, règles de qualité.
Exemple : validation d’un communiqué de presse sensible.
- L’agent communication produit une première version du texte.
- L’agent juridique vérifie la conformité : mentions obligatoires, absence de promesses trompeuses, respect des réglementations sectorielles.
- L’agent conformité interne s’assure que le ton et le contenu respectent la politique de l’organisation.
- Enfin, un agent QA relit la sortie : si une incohérence ou un biais est détecté, la réponse est renvoyée à l’agent concerné pour correction.
Ce flux illustre comment chaque agent n’est pas une entité libre, mais une brique contrôlée dont la sortie est validée, corrigée ou rejouée si nécessaire.
Rôle de l’orchestrateur
Pour transformer cette collection d’agents en système opérationnel, un orchestrateur est indispensable. Il a quatre fonctions :
- Coordination – assigner la bonne tâche au bon agent au bon moment.
- Contrôle de flux – garantir que la sortie d’un agent respecte le contrat attendu par l’agent suivant.
- Surveillance – enregistrer les étapes, tracer les erreurs, mesurer les performances.
- Escalade – décider quand réintégrer un opérateur humain dans la boucle.
L’orchestrateur n’a pas vocation à résoudre les tâches : il assure la discipline du processus. Il est à la fois la colonne vertébrale et le garde-fou du système.
Illustration : gestion d’un ticket client
Prenons un cas concret : un client signale une double facturation sur son abonnement.
Dans une architecture à agent unique, la réponse peut être approximative et soumise aux biais d’interprétation.
Dans un workflow agentique :
- Classification : identifier la demande comme un problème de facturation.
- Analyse client : récupérer l’historique, le statut, les engagements contractuels.
- Recherche de précédents : retrouver des cas similaires déjà rencontrés.
- Expert produit : valider la cause technique et le correctif applicable.
- Agent juridique : vérifier la conformité légale (mentions obligatoires, délais de remboursement).
- Agent conformité interne : contrôler l’alignement avec la politique de l’organisation.
- Relation client (Conflits) : rédiger une réponse dans le ton adéquat, ferme mais empathique.
- Rédaction finale : consolider l’ensemble en un message cohérent et actionnable.
- Contrôle qualité : vérification finale. Si une omission ou une incohérence est détectée, l’orchestrateur relance l’étape correspondante.
L’orchestrateur exécute le flux, journalise l’ensemble et déclenche les suites nécessaires. Ce processus réduit fortement le risque d’erreur, d’improvisation ou de promesse irréalisable.
Pourquoi ce modèle s’impose
Le workflow agentique n’est pas un simple effet de style : c’est une architecture d’industrialisation de l’IA, pensée pour la fiabilité, la gouvernance et la performance.
- Résilience et reprise contrôlée : si un agent échoue, l’orchestrateur peut relancer la tâche, rediriger vers un agent alternatif ou escalader à un humain. Le système évite le blocage global, mais considère tout de même les étapes critiques nécessitent d’être reprises.
- Modularité et évolutivité : chaque agent peut être ajouté, retiré ou mis à jour indépendamment, sans perturber le système global.
- Fiabilité par vérification croisée : les agents se relisent mutuellement ou sont contrôlés par un agent QA, réduisant les hallucinations jusqu’à 89 %.
- Exécution parallèle et adaptabilité : les agents travaillent en parallèle et réajustent le flux en temps réel selon les retours ou la charge.
- Intelligence collective : la coordination d’agents spécialisés génère une performance plus riche qu’un agent unique généraliste.
- Traçabilité et gouvernance renforcée : chaque décision est auditable, et des couches comme Governance-as-a-Service assurent une régulation continue.
- Résultats concrets : adoption dans la finance, la supply chain, la R&D, avec des gains forts (efficacité, fiabilité, personnalisation).
En pratique, l’agentic workflow fait le pont entre l’agent unique, souvent brillant mais fragile, et l’écosystème IA orchestré, robuste, agile et gouvernable. Il répond directement aux besoins des entreprises dans des contextes professionnels exigeants : conformité, continuité de service, optimisation des coûts et réduction du risque opérationnel.